jeudi 6 octobre 2016

Espæce, l’Histoire avec sa grande hache



Critique
« Pas facile, l’art contemporain » : réflexion en sortie de salle. Ou encore : « Bon courage pour la critique » (une main compatissante sur votre épaule). Et pourtant, tout est là, bien lisible, sur le plateau du Grand T. Dans ce nouveau spectacle, Espæce, Aurélien Bory démontre sa capacité à adapter son outil à son propos. On ne l’a jamais vu répéter une formule magique, rééditer sa forêt de fils, son chapiteau flasque. Si ça marche, il faut tenter autre chose.
Avec Espæce, le metteur en scène ouvre un livre aimé (Espèces d’espaces, de Georges Perec) et le déplie dans l’espace scénique. Un artisanat virtuose de l’espace se met en route. Un simple fond de décor devient machine dévoratrice, train d’enfer, se plie et se déplie vers les humains (cette espèce qui habite les espaces). À eux d’éviter de se faire pincer. Parfois ça passe ric rac. Ils prennent des risques énormes.
On pense à Tati, à Chaplin, devant ces scènes muettes. Jusqu’au souvenir d’enfance, un moment mimé qui semble résumer toute la tragédie de Perec, la déportation de sa mère. Le malheur, lieu de naissance de l’écriture. Derrière les jeux de mots croisés, l’Histoire avec sa grande hache.
Daniel MORVAN.
Ce soir et lundi à 20 h 30 ; samedi à 19 h ; mardi à 20 h. Au Grand T, avenue du Gal Buat. Tél. 02 51 88 25 25.

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