jeudi 23 mars 2017

Punk is dead: Il y a 40 ans, Eudeline allumait sa mèche



Le punk a 40 ans, et plus toutes ses dents. Pour rendre compte de ce mouvement musico-social, Stereolux sort le grand jeu : expo, films et concerts. Invité spécial, une figure du punk français, Patrick Eudeline.

Entretien
Patrick Eudeline, écrivain.

Vous souvenez-vous des années punk ?
« Ceux qui y étaient ne peuvent pas s’en souvenir », vous connaissez la phrase célèbre. Mais j’étais bel et bien là, cette année 1976 qui vu naître le punk. Je suis même le seul survivant du groupe Asphalt Jungle, l’un des premiers groupes punks français. Vous savez, en France cela n’a duré qu’un an, un an et demi maximum. Du moins avions-nous le sentiment aigu de vivre un moment bref, mais dont on parlerait très longtemps. Et le slogan de l’époque : No future ! reste valable aujourd’hui.

No future, ça voulait dire quoi en français ?
Ça voulait dire la même chose que partout : le rêve hippie était fini. Adieu l’âge du Verseau, le bonheur éternel et toutes ces fadaises de babas cool. Dream is over, disait Lennon : le rêve est terminé. Le punk est venu clore le cycle des années 50, la prospérité, les trente glorieuses…

Et vous, Eudeline, qu’est-ce qui a clashé en vous ?
J’étais un petit-bourgeois parisien, et j’ai rencontré le rock vers 12 ans. Les choses sont allées très vite : j’ai découvert les écrivains décadents français, les Huysmans, Villiers de l’Isle Adam, tout explosait : à 19 ans, j’ai rencontré William Burroughs, croisé Blondie dans le métro. J’ai écrit dans le magazine Best, vu et écrit sur Lou Reed et le Velvet Underground, les Flamin’ Groovies, les Sex Pistols. C’était incandescent.

Vous aviez le temps de regarder la France, à l’époque ? Et Paris ?
Nous étions les derniers des Mohicans dans cette France profonde. Mais Paris, Paris… Les Kinks, c’est Londres, et le Velvet Underground, c’est New York. Paris était ma ville, plus dangereuse qu’aujourd’hui mais plus belle. Pas de gauche caviard ni de bobos à l’époque, on avait encore les loyers de 1948, pas chers. Les punks, ont relancé le Marais, Belleville et le 14e arrondissement. C’est le boulot des artistes, de porter une vision sociale et de faire aimer les parties mal aimées d’une ville.

Ça ressemblait à quoi, un punk français de l’époque ?
Ça ressemblait à un punk mais en plus fort : nous avions les cheveux plus dressés que Sid Vicious, le cuir plus clouté que les New York Dolls, les jean’s plus déchirés qu’Iggy Pop. Tout ça grâce à Vivienne Westwood, cette styliste anglaise qui piquait ses idées dans la rue. Quand on a vu apparaître les épingles à nourrice en or, on a su que c’était mort.

Vos influences profondes, c’était qui ? Les Stones ou Françoise Hardy ?
Hardy, bien sûr. Les Stones n’étaient déjà plus de ce monde, rien qu’une machine commerciale, après leur dernier bel effort d’Exile on the main street (album de 1973). Nous avions une tendresse infinie pour Serge Gainsbourg, Polnareff et Hardy. On les reprenait sur scène, à contre-courant de la tendance qui consistait à dénigrer la langue française.

Vos idoles d’alors le sont toujours ?
À l’époque, on s’est tous pris le premier album des Clash en pleine gueule, c’est le plus fort. Strummer était l’icône de la révolte anti-Thatcher, du combat sandiniste. Mais notre Maître à tous est Paul McCartney. Plus grand que Dylan et tous les autres.

Comme lui, vous observez une stricte hygiène de vie ?
J’ai stoppé les drogues, et moins d’alcool. Autre question ?

Quelques conseils diététiques pour nos lecteurs ?
À l’époque, nous étions tous fast-food, on mangeait n’importe quoi. Aujourd’hui, beaucoup de punks sont vegan. Je suis seulement végétarien, mais de stricte obédience.

Recueilli par Daniel Morvan.

Samedi 25 mars à 16 h, table ronde : Tranches de vies, London-Paris 1976-1978, deux histoires punk, avec Patrick Eudeline et bruno Blum. Stereolux maxi, entrée libre et gratuite. Stereolux, 4 bd Léon Bureau, Nantes.
Du 23 au 29 mars, Fils de punk 1977-2017 : expos, concerts, projections, ateliers. Programme :
www.stereolux.org

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