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mercredi 8 juin 2016

Beach House: dans la famille Legrand, la nièce



Victoria Legrand (Beach House) © DR


S'il y avait un malentendu sur Beach House, groupe pour hipsters, il est levé. Au lugubre carrefour Stereolux, ce lundi 6 juin 2016, on avait peut-être encore dans les oreilles le son des albums : tempo mou, phrasé vaporeux et impression que le même morceau se répète de plage en plage comme quand on vous a oublié en salle de réveil, parce que tout le monde est parti. La surprise est d’autant plus grande que l’image trahit le son : mêmes coulis de guitares cassis et de claviers comme sur la radio-réveil Casio des années Dominique A, mais ne cherchez pas les palmiers en plastique, même ça vous sera refusé: le groupe de dreampop s’est transformé en quatuor séquestré par des skins en manque. Le rêve (si le mot a un sens) est toujours présent dans cette voix qui voudrait s’envoler, et Victoria Legrand n’est pas pour rien la nièce de Michel. La couleur dominante est le noir, le noir Stephen King de Misery, le noir Michel Ange. Une touffeur de cave à charbon dévastée par des drone suicide, dans laquelle Beach House enracine ses boucles, sous les franges obscures d'une pénombre rebelle. Il s’en faut d’un cheveu que cette pop ne bascule dans le tragique, du côté de Nico : musique de rêve, oui. Mais de ces rêves montent des visions intenses, torturées, terminales, qui ne sont pas pour les hipsters.



vendredi 25 mars 2016

Quand Katerine se fait son "Film"

"Le Film", nouvel album de Katerine, est un disque touchant, minimaliste et intime. 16 chansons qu'il a improvisées au volant de sa voiture, avant de les enregistrer en studio, comme autant de scènes d'un film sonore... Au générique, Katerine au piano, accompagné de son complice Julien Baer. Sortie le 8 avril 2016, et une tournée piano-voix dans la foulée.


Dans votre album, une chanson sur votre père disparu. Qui était-il?
Un homme qui se déplaçait lentement, souverainement, et doué d’une fantaisie inouïe, avec son mélange de patois vendéen et d’imagination débordante. je chantais l’une de ses chansons avec mon premier groupe, les Tics, à Chantonnay.

Vous parlez des objets qu’on garde. Vous êtes très vintage, côté fringues?
Je vais jusqu’au bout de mes pulls.

Mais en même temps, ce disque parfois grave reste toujours sur sa note joyeuse, on pense au petit conservatoire de Mireille, à Bourvil...
Comme Bourvil, je suis très rural. Et j’adore Mireille, c’est une référence qui compte dans cet album que j’ai appelé le Film, mais qui est un film sans cinéma. Plutôt un documentaire avec les chansons dans l’ordre où elle viennent, le tout en deux ou trois mois. Tu te lèves le matin et tu regardes la vie qui va, c’est ça, cet album. j’aime quand ça reste léger, la voix la plus légère l’emporte toujours chez moi.
...

vendredi 15 janvier 2016

Le Coq, le chanteur qui ne cherchait pas la lumière


Le musicien Thierry Le Coq est décédé jeudi 14 janvier 2016 – le jour de son anniversaire. Originaire du Morbihan, le chanteur installé à Nantes, venait d’avoir 50 ans.

« Il ne cherchait pas la lumière », dit simplement Dominique Marie, son attaché de presse. Mais la lumière, elle était dans ses chansons, souvent mélancoliques, secrètes, intimistes. Et vingt ans après le lancement de son projet artistique, Le Coq continuait sa route. Et s’apprêtait sortir de l’ombre pour faire la promo de son dernier album, version vinyle, quand le cœur a lâché, le jour de ses 50 ans. Un album plus joyeux que les autres, disent les amis…
On l’avait vu chanter dans le Morbihan, au sein du groupe Mauvais Sang, avec Dominique A en première partie… Et aussi en premier partie de Daniel Darc. Thierry Le Coq avait commencé sa carrière dans divers groupes vannetais : Ivamaïn, Mauvais Sang, Candid. Il avait ensuite joué avec Dominic Sonic et, à son arrivée à Nantes, avec des musiciens de la région : Marc Morvan & Ben Jarry, Oldman…

« Il composait une musique intimiste, raffinée mais sans snobisme, dit encore Dominique Marie, mais qui se méritait et portait sa marque d’artiste. » Et c’est la référence de Nick Drake qui vient à l’esprit : même si Lecoq chantait en français, la pop anglo-saxonne et la musique folk et blues étaient bien ses sources d’inspiration, comme on peut l’entendre dans ses récentes vidéos captées à Trempolino.


« Ce garçon étrange »


En 1999, paraît son premier album solo La Fenêtre, aussitôt salué par les Inrockuptibles : « Ces chansons composées à même le bois, sont baignées d’une lumière douce et chaleureuse, refusant l’obscurité cache-misère des minimalistes, préférant regarder dehors en couleurs rosses, plutôt que son nombril à la loupe ».
Deux albums avaient suivi sur le label de Pierre Barouh, Saravah : Interludes en 2002, composé de climats tour à tour orageux ou tempérés. Puis Tête de Gondole en 2005. À nouveau, la critique saluait la singularité de ce « garçon étrange » qui incarnait une certaine idée de la chanson française, « cultivant plutôt un jardin de fleurs carnivores que les béats parterres actuels », selon Christian Larrède.


"Grandes chansons à usage intime"


« D’Arradon » avait suivi en 2009, et enfin « Chaconnes » était sorti en 2013, où éclatait à nouveau le talent d’un « merveilleux chanteur français méconnu ». Chaconnes était réédité en vinyle en décembre 2015, et toujours écoutable sur Bandcamp. « Qu’importe leur anonymat : ce sont des grandes chansons à usage intime, qui chamboulent et rendent maboul, avec leurs mélodies en opaline et leur murmure du son », écrivait le critique musical JD Beauvallet dans Les Inrocks.
Cette réédition en vinyle était « une chose dont Thierry était particulièrement satisfait, estime Dominique Marie. Thierry ne posait pas à l’artiste maudit, mais il était heureux de ce disque plus joyeux que les autres. Et sans parler d’une tournée, il se préparait à remonter sur scène. En pleine promotion de cette nouvelle sortie, il était sur scène, la veille de sa mort. »
Sur Facebook, parmi les hommages, Sylvain Lasco se souvient d’un « garçon discret et attachant. Je garde de lui un moment d’exception où il faisait la première partie de Daniel Darc et où il fît une reprise d’un titre de Moondog fabuleuse… Nous étions une cinquantaine d’heureux élus dans la salle… Darc était seul sur scène avec un pianiste. Thierry était au même niveau que Darc ce soir-là… Mémorable. Son jeu de guitare était très subtil et éblouissant. »


Daniel MORVAN.


mardi 6 mars 2012

Dominique A: Les treize titres de "Vers les lueurs" (album 2012)



Voix haut perché, mode sombre et tendu, exigence littéraire dans le droit fil de Manset, Murat : le Dominique A de 2012 est un bon cru - un quintette à vents ajoutant une tonalité boisée et baroque aux sons électriques. Le chanteur commente ses nouvelles chansons, titre par titre.
1 : Contre un arbre. « Oublie la ville : Une vraie déclaration d’intention en début d’album. Guitares électriques, hautbois et basson sont associés comme dans tout le disque, enregistré en son « direct ». Dans la vie, le Nantais Dominique A n’oublie pas sa ville : « je ne me réinstalle pas à Nantes, mais j’ai envie d’être là. Je me sens apaisé et serein, ici. » Avec vue sur la Loire.
2 : Rendez-nous la lumière. « Une chanson lyrique, voire pompière, pour dire les regrets de l’homme d’avoir saccagé son univers. » Le premier single du 9e album.
3 : Ostinato. « Des bruits de verre, un enfant qu’on entend pleurer dans une maison. Un titre marqué par mon obsession de la fuite. »
4 : Parce que tu étais là. « Une mélodie d’amour boisée, inspirée d’un roman où j’ai trouvé cette idée : Au-delà de tout romantisme, le fond de l’affaire tient à ce constat objectif : je suis venu vers toi parce que tu étais là. »
5 : Parfois j’entends des cris. « J’ai pensé au travail jazzy de Comme à la radio, de Brigitte Fontaine. C’est le morceau de bravoure scénique du disque. »
6 : Close West. « Cette chanson évoque mon ouest proche, celui de Beslé-sur-Vilaine, près de Massérac et Guipry. J’y ai toujours une maison de famille. C’est un lieu d’enfance lointain et proche, à cheval entre les deux départements. Quand je passe en train, si j’oublie de regarder la Vilaine, j’ai l’impression d’avoir raté mon voyage. »
7 : Loin du soleil. « C’est mon Enfant du Pirée [la chanson de Dalida] à moi ! J’ai voulu une chanson chaloupée et suave. Elle raconte un désir de douceur. J’aime les deux, le côté à vif du rock et la nonchalance jazzy, avec (comme tout l’album) un son live, travaillé en résidence à Fouesnant. »
8 : Quelques lumières. « Parmi la vingtaine de chansons de départ, cette chanson pop a d’abord été écartée. On me disait qu’elle méritait d’être sur le disque : il y avait quelque chose à faire. Ce n’est pas toujours le cas. J’ai voulu faire une reprise de Ma jeunesse enfuie, d’Yves Simon. David Euverte (arrangeur) m’a dit : je ne peux rien faire pour celle-là. »
9 : Vers le bleu. « Une histoire de mauvais garçon. Elle ne parle pas de mon frère, je suis fils unique. Je ne sais pas d’où ça vient. D’un roman de Dominique Fabre. Cette chanson est une petite nouvelle. En répétitions, elle est partie vers un son très « Motown ». J’aime bien ce côté sucré-salé de la pop, une histoire sombre sur une musique gaie. Ce n’est pas ma préférée… Pourtant, elle sera sans doute un single ! »
10 : La Possession. « C’est le nom d’une localité de la Réunion. Cette chanson assemble des images éparses sur une pulsation afrobeat, avec les arrangements à la Ravel de David Euverte. »
11 : Ce geste absent. « Un slow classique à la Christophe. »
12 : Le Convoi. « Quatre accords en boucle, des images de jungle birmane, une envolée d’instruments. »
13 : Par les lueurs. « Les trois dernières chansons du disque, comme celle-ci, sont des boucles de quatre accords non-évolutives. Celle-ci collecte une série de flashs sur l’envie d’être traversé par des euphories, des bonheurs impalpables. »
Daniel Morvan
Vers les lueurs, sortie le 26 mars 2012. Dominique A en concert au Lieu Unique (Nantes), jeudi 12 avril à 20 h 30 (18 €/25 €). Avec en première partie, « La Fossette » (premier album du chanteur) en live. Réservation : tél. 02 40 12 14 34.