Au départ, La Noce est un vaudeville de Tchekhov, années 1885. Aucune raison de revisiter ce texte vénérable ? Il faudra poser la question à la sortie des représentations du Grand T. Lorsque, scotché par deux heures de jam-session biélorusse, vous vous demandez : au fait, c’était bien du théâtre, ce qu’on vient de voir ? Ou le prochain Kusturica tourné en apesanteur autour de la planète Mars ?
Du théâtre, ça l’est. La Noce, ça se lit en 15 minutes chrono. Un bon texte pour les classes théâtre, du concentré de Tchekhov, bouffon mais subtil dans l’art de dévoiler les misères humaines. Décidé à obtenir la dot convoitée, un marié russe se heurte aux manœuvres d’une belle-famille très rusée. Pour faire riche, on a recruté des figurants et même un marin de 82 ans payé 25 roubles pour jouer les excellences.
Créé pour le 150e anniversaire de la naissance de Tchekhov, avec le Théâtre Ianka Koupala de Minsk, le projet du metteur en scène Pankov est de la pure dynamite. Idée de base : injecter des jeunes artistes fous dans une troupe nationale académique. Faire durer le plaisir en forçant la dose sur les chansons à boire, les marins et les belles filles en maillot 1900. Faire jouer le texte en deux langues, russe et moscovite, sous-titrées en rouge et en vert. Étirer toutes les répliques, tous les personnages.
Image conductrice de cette mise en scène : le ballon de baudruche, qui autorise Pankov à gonfler démesurément le temps théâtral, à insuffler aux corps une présence (une beauté) surréelle, à tirer d’un violoncelle ou d’une guitare hawaïenne des états de pure hypnose. Puis surgit soudain… Joseph Staline. Invité d’honneur (façon lapin Duracell en fin de course) d’une noce de fauchés, mais artistiquement milliardaire.
Daniel Morvan.
Ce jeudi 15 novembre 2012 au Grand T à 20 h, vendredi 16 à 20 h 30 et samedi 17 à 19 h.
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