Lucia Antonia, funambule. Ces carnets d'une artiste privée de sa partenaire de cirque, tombée pendant son numéro, forment au fil des pages le récit poignant d'une perte irréparable. Arthénice était la jumelle funambule, l'exquise, la lumineuse. Plus que l'amie, plus que la soeur, le double de Lucia Antonia, elle a été avalée par l'abîme et l'insupportable est de vivre encore après elle.
À petites touches l'auteur dessine cette figure d'une infinie délicatesse, voilant de silence les émotions trop intenses. Il faut toute sa maîtrise de l'écriture et sa puissance d'évocation pour se glisser ainsi dans les carnets de la jeune femme, pour s'effacer derrière son personnage. « Elle s'est imposée, confie l'auteur. C'est comme un ange qui vous fait la grâce d'être présent. On lui dit bonjour et on écrit ! » La forme des fragments permet un jeu d'écriture subtil qui laisse au lecteur une grande liberté d'imagination.
Sur une saline abandonnée, Lucia Antonia, qui a quitté le cirque, flotte entre culpabilité d'être vivante et espoir malgré tout. Belle comme une figure de Bergman, tout comme Arthénice la disparue, la funambule Lucia Antonia emmène son lecteur très loin.
Lucia Antonia, funambule. Zulma, 129 p., 16,50 €.
(Presse Océan, sept. 2013)
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