Les statues zoomorphes des tribus mélanésiennes, les masques taillés dans les fougères arborescentes et montés sur des toiles d'araignée, les gravures rupestres de la Montagne aux écritures... Dans le musée imaginaire de Roselyne Gicquiaud-Bouchet, il y a les arts premiers et ceux qu'ils ont inspirés : « Jules Paressant et ses marines, Gaston Chaissac qui a peint sur des portes de placards, des planches pourries ou des épluchures.»
L'homme, le vrai, se carapatant à toute blinde
La comparaison avec le naïf de Vendée s'arrête là. Roselyne ne peint pas de têtes étonnées et de grands yeux ronds sur des pelles ou des enjoliveurs. L'homme, elle le met à sa place : en fuite, se carapatant à toute blinde. Le bipède n'est qu'une silhouette ironisée, en fuite dans ses grands formats, à propos desquels il faut éviter les mots panneau, panonceau ou enseigne. Sous peine d'être reconduit aux frontières de la couleur, derrière la porte de la galerie.
Jocelyne a du sang dukduk, des ancêtres micronésiens, et une chose est certaine : sa vocation n'a pas mille ans. Cela s'est exactement passé en l'an 2000, un lundi. « Je peignais des pots, j'avais le goût du dessin depuis l'enfance. Je tournais en rond autour de mes pots, et j'ai subitement eu besoin de faire du plat à la peinture. J'achète des planches. Je les scie, je les ponce mais pas trop, je les colle, je les peins. »
La sophistication des supports, caractéristique des arts premiers (avec leurs ligatures, leurs pigments, leurs fines architectures) est absente des tableaux présentés ici pour la première fois, et issus d'une seule année de travail. Le choix des planches assemblées répond à un besoin de rugosité rassurante, de relief, de répondant.
Pour le reste, la planche est une surface lisse où le pinceau glisse sans tourner. Jocelyne a échangé le vélodrome des pots de terre contre le ruban de terre ocre qui mène vers son musée imaginaire: les Danakils, les Peuhls ou les Dogons. La longue distance lui convient mieux, elle y respire à l'aise, définitivement hors-circuit.
« Depuis que j'ai trouvé le bon support, je me sens parfaitement bien. Mes inspirations sont les arts africains, leur spontanéité me touche, même si la dimension sacrée de cet art m'échappe. »
Pour le reste, la planche est une surface lisse où le pinceau glisse sans tourner. Jocelyne a échangé le vélodrome des pots de terre contre le ruban de terre ocre qui mène vers son musée imaginaire: les Danakils, les Peuhls ou les Dogons. La longue distance lui convient mieux, elle y respire à l'aise, définitivement hors-circuit.
Poules acidulées, escargots psychédéliques
« Depuis que j'ai trouvé le bon support, je me sens parfaitement bien. Mes inspirations sont les arts africains, leur spontanéité me touche, même si la dimension sacrée de cet art m'échappe. »
Couleurs crues, schéma bidimensionnel, animaux stylisés entourés de frises géométriques et végétales : Roselyne a-t-elle donné dans le panneau de la peinture décorative ? « Si on me dit que ça fera joli dans le salon, ce n'est pas ce qu'il y a de plus agréable à entendre. Mais c'est venu ainsi, c'est sorti d'un bloc. »
La couleur sortie du pot est d'ailleurs plus subtile dans les dernières œuvres. Les sujets animaliers, toujours ironiques, évoluent eux aussi. Elle a commencé par les plus gros animaux, éléphants, rhinocéros, baleines, ours et crocodiles, pour glisser progressivement vers les poules acidulées, des escargots psychédéliques, des dromadaires philosophes, en « hommage à Théodore » <Monod>. Ils ont tous l'air de sourire. Sauf l'homme, qui a le masque.
Daniel MORVAN.
La création du monde, de Roselyne Gicquiaud-Bouchet.
Paru le mercredi 27 février 2002 (922 mots) dans ouest-france
Paru le mercredi 27 février 2002 (922 mots) dans ouest-france
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