jeudi 30 mars 2017

Le Concorde projette du rêve depuis cent ans

Fanny et Sylvain Clochard

Le Concorde projette du rêve depuis cent ans
samedi 18 mars 2017 
801 mots
Daniel Morvan
Le Concorde, cinéma du quartier Chantenay-Zola à Nantes, fête son centenaire en 2017. Une fête anniversaire hors les murs, à l'ancien cinéma Olympic, marquera le début des festivités.

À l'origine, un dancing

Le Concorde n'a pas toujours été ce ciné de quartier connu de tous les cinéphiles nantais, qui adorent y découvrir les nouveautés en léger différé. Ou déguster les petits films fragiles ciselés par des cinéastes militants.
« À l'origine, c'était un dancing, indique Sylvain Clochard, successeur de son père Gérard à la gérance du Concorde. Ce cabaret finançait les colis des prisonniers de guerre en Silésie. Fin 1916, un soldat démobilisé est arrivé avec un petit projecteur Pathé 8 mm et une toile de tente. Il a dit : je vous fais une projo à la fin du bal. »

En 1918, le Grand National

La piste de danse s'est remplie de tables et de chaises. En janvier 1918, le concept est validé : vingt-trois ans seulement après la projection du premier film de l'histoire du cinéma, le Grand National, cinéma de 1 000 places (chaises, bancs) ouvre ses portes pour son premier siècle d'activité.
La commune rouge de Chantenay-sur-Loire a son cinéma, dans les salles 1, 2 et 3 de l'actuel Concorde. On descendra à 600 places de fauteuils vers 1920.
En 1934, il devient le Moderne. Aucun travail d'histoire n'a été réalisé sur le Concorde, ainsi baptisé dans les années 1950, période du boom des cinés de quartier.
Dans les années 1970, il se subdivise en trois, puis quatre salles, avec une orientation nouvelle « art et essai ».
Avant le rachat en 1984 par Gérard et Laurence Clochard. « J'avais alors 10 ans, se souvient Sylvain. Mes parents, trentenaires, s'ennuyaient dans leur métier et cherchaient quelque chose d'excitant. Ils ont hésité entre un poste à l'ambassade de Cuba et le rachat d'un cinéma moribond à Chantenay. Il ont choisi la seconde option.»

Séances mythiques de 23 h

Ce qui passe pour une blague se révèle être un concept : voir et montrer les films qu'on aime, tel est le projet du jeune couple. Ils découvrent le métier, rencontrent un public qui leur ressemble, la génération de 1968, biberonnée au ciné d'auteur, de Renoir à Truffaut.
Le cinéma en marge se trouve un lieu branché à Nantes« C'était cool, raconte Sylvain Clochard, un ciné avec des séances mythiques de 23 h, où l'on projetait Midnight express ou The rocky horror picture show devant des hordes de punks. « Je ne veux voir qu'une crête », ordonnait mon père. Et les disciples de Sid Vicious se rangeaient sagement. »

Sans pub

Cent ans après la première séance, la devanture vintage du Concorde s'élève toujours, comme une vigie, sur le boulevard de l'Égalité. Dans le vertigineux hall d'entrée qui conduit vers les vastes divans-fauteuils en cuir noir, l'attente est minimale : on s'immerge vite dans l'une des quatre salles pour des séances à injection directe, sans pub. L'absence de transition renforce la puissance onirique de l'écran.
Le Concorde reste le cinéma qui projette le plus grand nombre de films différents. « Dans l'agglomération, 56 écrans montrent 25 à 30 films, alors que les quatre écrans du Concorde en diffusent de 18 à 25. »
Une diversité qui continue à plaire à un public de la grande génération des cinéphiles. Mais si vous projetez Midnight express, vous aurez toujours un vieux punk à pointer sa crête au guichet. Presque déçu de ne pas entendre la voix de Gérard Clochard: «Je ne veux voir qu'une crête ! » 
Pour le reste, rien n'a changé.

Daniel MORVAN.
Contact. Cinéma Concorde, 79, boulevard de l'Égalité, à Nantes, www.leconcorde.fr. 6 € la séance, 5 € moins de 26 ans, 4,80 € abonnés, 4 € moins de 14 ans.

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