lundi 30 janvier 2017
Catherine Safonoff, le beau patineur et le grand paon-de-nuit
« Rencontre de Jean-Georges, rue des Eaux-Vives. C’était le beau patineur du quai, une guirlande de jeunes filles à ses trousses, le bon Tarzan installateur des balançoires dans les platanes de Baby-Plages ». C'est une musique particulière qui vous pousse, parfois, à entrer dans un livre. Pénétrer en douce dans une œuvre par la porte étroite d’un journal intime: pourquoi pas? Celui-ci vous capte immédiatement, grâce à son élégance d'écriture, cet allant et ce ton venu d'une Suisse sans clichés: c'est le pays de la romancière Catherine Safonoff (Le Mineur et le Canari, paru en 2012).
Son livre galope sur quatre saisons, mêle les souvenirs. Les récits d’une thérapie tendue et émaillée de cris; les lectures passionnées (influences majeures, Ramuz, Proust le temps d’un rhume et Colette à chaque page, comme une sœur lointaine). Les interventions d'auteur en milieu carcéral. Les histoires d’amour (un certain Léon et Z, le psychanalyste) avec chute (en Grèce).
Stylé comme un voilier sous un grain du Léman, l'ouvrage joliment édité par Zoé (Genève) porte un titre pioché chez Pascal Quignard: «la distance de fuite», l’écart que la proie doit maintenir pour échapper à son prédateur et trouver un abri.
C'est aussi la bonne distance à ménager pour laisser le monde venir à soi, comme cette femme sortie de prison et qui sonne à la porte. Pour offrir cette vision divine, comme une séquence oubliée de John Cassavetes: « quand ma visiteuse a tournoyé devant le miroir, ample jupe de soie bleu nuit, étroit corsage jaune, lèvres roses, yeux brillants, cheveux blonds attachés d’un velours noir, je crois qu’un grand Paon-de-nuit est entré un instant dans la chambre. Les papillons se trompent parfois de fleur. »
Daniel Morvan.
Catherine Safonoff: La distance de fuite. Editions Zoé (diffusion Harmonia Mundi). 328 pages, 18,50€.
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