jeudi 26 avril 2012

Premières pages de mon roman "Marquises"


Marquises


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« Si vous achetiez un de ces beaux caramels, dit-elle, en s’arrêtant devant un magasin rose et luisant comme une boîte de baptême.
Simone de Beauvoir : L’Invitée


La ville de L***, sur le rivage nord du Pays des Forêts, ne ressemble pas aux métropoles spécialisées de la Baie des Anges, de Macao ou de notre côte sud si attachée pourtant au travail : nul tripot où, dans une ambiance excitante de plaisir et de facilité, un peuple d’oisifs et de maniaques se laisse fasciner par l’idée du coup heureux qui procurerait en une seconde ce qu’une vie de labeur n’accorde pas, et surtout le rang social élevé qui relève aussi du hasard. Pourtant, l’accident auquel j’ai si mal survécu ressemble lui aussi à une faveur pure du destin, une sorte de ticket gagnant qui efface de ma vie un quart de siècle de besogne ingrate et, me libérant de tout surmoi littéraire, m’offre la page vierge de l’amnésie.
Je dirai donc sans détour, suivant les conseils de Madame de Genlis, l’auteur de qui je prends toujours conseil, que je m’apprêtais à entrer dans une boutique d’antiquités lorsque je fus violemment projeté contre sa vitrine. La scène se situe, je l’ai dit (on me verra souvent me répéter) dans une petite cité portuaire du nord, près de laquelle se trouve le château de Penarland, dont le nom fait parfois sourire les amateurs de calembours.
Le besoin de trouver du fixe, du pérenne s’éprouve partout, même dans ces petites villes où des vitrines offrent des objets qui outrepassent la valeur marchande, condensent la mémoire historique et offrent aux grands oublieux que nous sommes de quoi nous souvenir des temps passés. C’est donc avec raison que je me trouvais là ; ma présence sur la trajectoire d’une voiture folle ne devait rien au hasard. Je devais y chercher ma chance.
J’ai, dans cette vitrine, supposé de nombreux objets possibles de curiosité : une aquarelle Belle époque, un suspensoir chirurgical à verres objectifs, un pèse-esprit à cardans, une simple machine à écrire de marque Underwood. Je me souviens pourtant que, depuis ce point élevé de la ville, où se trouvait un mail, une promenade, le regard embrassait le port et au-delà de la digue qui le protège, percevait les lames écumeuses qui bondissaient en joyeuses aigrettes. Deux hommes passèrent, je saisis au vol une bribe de conversation : une femme avait passionnément aimé l’un d’entre eux, avait été trouvée morte de froid dans une rue de Saint-Pétersbourg, où il faudrait aller chercher son corps pour « la coucher dans notre cher Pays des forêts », ce qui me semblait échappé de quelque livre.
Si j’ai éprouvé dans ma vie plusieurs accidents, celui qui m’a ôté la mémoire est d’autant plus marquant que je me le rappelle. Me souviens-je seulement d’une lecture en croyant avoir un souvenir ? Suis-je victime de ces fameux souvenirs-écrans dont Hans Sachs, mon analyste, m’a parlé ? Quoi qu’il en soit, le bruit de l’automobile folle qui pulvérise la vitrine devant laquelle je me trouve n’est pas sorti d’un roman. S’y associent des images heurtées et mouvementées, que j’ai collectées parmi les papiers datant de ma longue convalescence : Hurlement de pneumatiques. Fracas d’une collision. Stridence d’un avertisseur bloqué. Sirène des sapeurs-pompiers et des ambulances. La voiture qui vous percute. Me voilà comme éparpillé au sol, tentant d’organiser mes perceptions et de comprendre ce que dit cet homme casqué agenouillé près de moi, qui m’emmaillote dans une couverture de papier doré semblable à un emballage de cadeaux.
Que me dit-il, ce sapeur-pompier ? Il me montre un feuillet. C’est votre écriture, la reconnaissez-vous ? Sur cette page de calepin, il y  une adresse. Le pompier vous demande : Vous aviez ce papier dans la main ; sur ce papier, le nom d’une femme, Louise de Penarland ; connaissez-vous cette personne ? Est-elle de votre famille ? Souhaitez-vous qu’on appelle ce numéro de téléphone ?
Et puis aussitôt après, le temps ne répondant plus aux phénomènes physiques d’étirement, d’écoulement, mais seulement à celui de la simultanéité, la voilà. Elle. Vous n’avez aucune notion de ce qui s’est passé entre la question et son arrivée, à cette femme. Vous ne le savez pas : vous n’avez eu qu’un mot pour répondre à la question du secouriste. Vous avez juste dit : Marquise.
Depuis la civière, je ne vois que ses jambes. Aussi bien je serais mort avec cette image dans les yeux, les jambes et le tailleur rose. Et puis sa main aux ongles laqués, serrée sur un trousseau de clefs avec le sigle de la voiture, l’étoile à trois branches.
Elle sera bientôt dans mes premiers souvenirs d’hôpital. Pourquoi vient-elle ? Mon cerveau ne peut pas se poser cette question. Il regarde seulement. Il regarde ses genoux quand elle s’asseoit devant moi, qui suis harnaché de perfusions et de capteurs collés sur la poitrine et sur le crâne enturbanné. L’infirmière dont je saurai bientôt le prénom, Dolorès, passe régulièrement pour me faire les tests, quelle année sommes-nous, pouvez-vous additionner ces deux chiffres ; devant moi, sous mes yeux, se tient la dame silencieuse.
Dans le coma, celui qui va suivre l’accident, j’aurai des rêves aériens. Je planerai dans la crinoline volante d’une marquise. Son visage me dira quelque chose. Ses cheveux aussi. Elle me sourira comme quelqu’un qui vous réserve une surprise. Elle souriait déjà ce soir-là, quand elle s’est baissée vers moi, étendu dans une couverture dorée, pour me dire : je ne pensais vraiment pas vous retrouver dans de pareilles circonstances.
*
Nombreux ont laissé des mémoires contenant l’histoire de leur existence entière, ou d’une suite d’années si longue qu’elle approche de toute une vie. Mes souvenirs ne remontent guère au-delà d’une douzaine d’heures, après quoi toute remémoration devient du roman. Baptiser celui-ci « mémoires » serait donc mentir. J’use, pour retenir les moments oubliés, de réminiscences, objets, livres, notes hâtivement griffonnées ; un mémorial de paperolles et de billets qui éveillent, par associations, de fugaces palpitations du passé. Tel est le destin des amnésiques, contraints pour se survivre d’écrire chaque jour leurs mémoires. Et de les oublier dans le même mouvement.
Mon cerveau ne peut ordonner une histoire dans l’ordre chronologique. Sur l’étendue d’une vingtaine d’années d’écriture du même livre, je peux dater chaque paragraphe, dire quelle idée m’a réveillé au milieu de la nuit, à quel moment j’ai pris un café pour écrire, pourquoi j’ai biffé, raturé, surchargé, supprimé, regretté de l’avoir fait, rétabli une version antérieure. Je pourrais vivre mille ans que ce manuscrit serait encore sur ma table, comme il l’est depuis tant d’années déjà. Mais quant à l’accident, ma vie antérieure, rien de nouveau : je puis récrire sans cesse mes souvenirs, cela ne me fait pas souvenir davantage.

Trépans et tarières ont foré l’os. Les traitements de texte ont digéré ce livre à mesure qu’il s’écrivait, et avec lui la réalité aussi a été consommée, transformée, détruite.
Mes pensées ont cependant conservé la liberté des images fugaces, libres comme le rêve, qui traversent le cortex d’un comateux. L’amnésie n’affecte pas l’imagination. Les pensées se dilatent et, comme un aérostier qu’emporte un ballon d’air chaud, je me laisse dériver au fil des courants aériens.
Heureux homme qui dispose encore de souvenirs, oserais-tu te plaindre qu’ils ne se présentent pas tout ordonnés sur la page, disciplinés comme dans un roman ? Mon auteur préféré, la mémorialiste Madame de Genlis, m’a appris à tirer parti des petits moments perdus et des choses contées par les voyageurs sur leurs voyages, les artistes sur leurs arts, toutes personnes ennuyeuses par ailleurs mais précieuses dans ce qu’elles savent ; de même, quelques souvenirs ternes et sans couleur peuvent, une fois choisis et réunis, nous apprendre beaucoup.


mardi 6 mars 2012

Adieu à Arthénice


Ce texte avait été lu aux funérailles de Mathilde.

Pour changer un peu des trucs tragiques, j’avais écrit un petit refrain pour toi :

Je voudrais que la marchande me dise bonne semaine Simone
Ou bien qu’elle me dise : tout de même quel bel automne
Je voudrais aussi qu’elle me dise bonne année René
Mais la marchande me dit toujours bonne journée.


Ce refrain reste suspendu dans l’air, comme la pièce de théâtre que nous allions créer, Traces de Khôl. Nous étions tellement heureux d’imaginer tes copines comédiennes, Léa, Lucie, Morwenna dans leurs différents rôles.

Tu avais peur que j’aie peur. J’avais peur que tu voies que j’avais peur.

Je n’ai même pas eu le temps d’encadrer l’affiche des Parapluies de Cherbourg offerte à Noël.

Tu m’a démontré que Benjamin Biolay est un vrai chanteur.

Tu ne croyais pas à la mort, puisque tu étais la musique et la grâce dans leur pureté intense. Mais le mélanome n’est pas mélomane.

A l’Hôtel-Dieu, tu as fait le mur en pyjama avec ta voisine de chambre (pompe à morphine sous le bras), pour aller au concert.

Tu taquinais les chirurgiens sur l'imprécision de leur vocabulaire, quand ils disaient : « tu branches ce truc-là sur ce machin ».

Tu avais une conversation délicieuse.
Tu disais des choses marrantes, touchantes, comme :
« Est-ce que les neurochirurgiens, quand ils font leur footing, se racontent des histoires de cerveau ?»
« Mes parents, vous êtes mes meilleurs amis » ;
« Il y a dans la nature humaine quelque chose qui fait qu’on espère toujours » ;
« pour certaines personnes, le cancer est la chance de leur vie » ;
« je prépare ma légende » ;
« 25 ans de bonne santé, c’est pas mal déjà » ;
« C’est sûr maintenant, juillet n’est pas un mois comme les autres » ;
« je me sens pleine de patience et d’amour, je me sens comme mère Térésa » ;
« Je vais prier. Pour moi. On ne sait jamais »


Ton côté grande marquise, tenant salon dans le hall de l’hôpital, comme l’impératrice Plotine. Tu m'as piqué le portrait de Madame Récamier. Tu m’as aussi piqué une diapositive, pour en faire ta première chanson.

Je me souviens de ton sommeil paisible dans le jardin, avec la nature qui t’entoure, te protège de toutes ses forces, comme un paravent d’oiseaux, un bouclier de fleurs, une barrière de parfums.

"Ce qui est fascinant, c’est la dernière fois. Saurons-nous quand nous serons pris en photo pour la dernière fois ? Le savons-nous quand nous voyons une personne pour la dernière fois ? La dernière phrase d’un livre a plus d’importance que la dernière".

Ta réponse à la maladie fut la couleur rose, le rose Jacques Demy.
Rose la robe de chambre,
rose le turban,
rose, les langoustines,
rose, le rosé.
Rose, ta belle robe de scène cop. Copine dont tu étais si fière et qui est aujourd’hui ta dernière robe.

Adieu ma fille adorée, toi qui ne croyais pas en la mort.
Tu nous as tant donné que nous ne manquerons de rien pour poursuivre le chemin, sans toi mais avec toi.

Sache aussi que ton frère Louis est beau et fort dans l’épreuve. Il a posé sa tête sur mon épaule, a versé ses larmes et s’est redressé comme un vrai samouraï.
Il t’admirait en silence.

Adieu ma jolie Arthénice.
Tu étais aussi ma meilleure amie.

Les citations de la co-location





Mathilde et Léa ("Simone et Bertille", sur la sonnette d'entrée) louaient un appartement des plus demyesques, rue Rosière d'Artois à Nantes. Mathilde notait sur sa page Facebook quelques moments de fou-rire partagé avec sa chère et fidèle complice.
"-j'aimerai bien avoir un groupe!
-mais on est un groupe! A partir de deux ça fait un groupe"

"On est chianteuse alcolloc!"

"Tinquiète, la pièce va marcher, et puis c'est sans compter le bouche à bouche."

"elle sortait avec un mec qui mixait tu vois, un mixeur"

"j'me souviens même plus de la dernière fois que j'ai eu un trou noir..."

" ça commence à me pomper la ciboulette"

"- léa tu veux pas qu'on achète un porte vaisselle?
- non
- pourquoi?
- par gout du risque"

"- Léa, je crois qu'on est en plein déclin...
- qui ça? nous deux ou le monde en général?
- nous en général"

"on rigole tellement... je comprend pas pourquoi on a pas + d'abdos"

-il paraît qu'un p'tit verre de vin par jour c'est bon pour la santé.
-Ben nous on a notre quota pour la vie je crois.

-moi je veux pas d'un mec branché, je veux un plouc, un has been qui aime Michel Berger et Michel Legrand!

À propos de moi :
"on est jamais si heureux ni si malheureux qu'on imagine"
Livres préférés :
Mai 69 de Daniel Morvan
Maximes de La Rochefoucaud
Platonov de Tchekhov

à ma fille








Très chère Mathilde,

Je ne sais pas grand chose de toi. Comme tant d’événements qui te font désormais une légende, tu es entrée dans ma vie un matin de juillet dernier. Ton père avait lu un livre que je faisais paraître. Nous avons correspondu. Il m’a parlé de toi. Je me souviens que j’étais à la campagne. C’était le matin. La fenêtre de ma chambre était grande ouverte. Le soleil était éclatant, et l’odeur du bois en dessous presque étourdissante. Tu portais le prénom que j’avais donné à l’héroïne d’un livre après lequel je n’avais plus écrit pendant dix ans. Tu aimais La Rochefoucauld et la musique que j’aime tant, l’un et l’autre. Tu avais un amoureux. Tu composais des chansons. Ta vie était toute rayonnante, et menacée. Ton père et moi, nous t’avons nommée la belle Arthénice, comme les nymphes et les dames du Grand Siècle qui tenaient salon, qui voulaient que l’esprit et la beauté fussent une loi du monde. Je ne crois pas qu’il y ait un jour depuis ce matin de juillet où je n’ai pas pensé à toi. J’ai admiré ta force, ta grâce imparable, cette extraordinaire négation du laid, de la mort, de la tristesse, dont tu devenais de plus en plus l’image, comme le laid, la tristesse et la mort auraient voulu avoir raison de toi. Comme j’aime cette photo où tu enregistres ton disque et où tu poses sur celui qui te photographie ton regard clair de très jeune femme que rien ne brisera. J’ai redouté le combat que tu menais. Ton père m’a dit que tu ne croyais pas à la mort. Comment aurais-tu pu ? Tu voulais et tu incarnes de la vie chacune de ces beautés improbables qui ne sont pas la mort.

Tous les matins du monde sont sans retour, Mathilde, et un matin de janvier t’a emportée. Je ne t’ai jamais rencontrée. Nous n’avons pas eu le temps. J’ai entendu ta voix et je l’écoute encore en t’écrivant. J’avais pensé que je t’écrirais une chanson. Les matins du monde sont sans retour : ta voix ne s’emparera pas de mots que j’aurais inventés pour elle. Mais ta voix demeure, et ce que ton regard clair dit. Tu me manques déjà. Comme tu dois manquer à tes parents, à ta sœur, à ton frère, à tes amis, à ceux que tu aimais. Comme je songe à vous, mes amis, ce matin, et comme votre peine demeurera la mienne. Belle Arthénice, tu as jusqu’au bout envoyé promener toutes les ténèbres et la laideur que nous laissons si souvent s’insinuer en nous. C’est à nous maintenant de te faire vivre encore et longtemps. Nous souvenir de toi, ce n’est rien. Nous allons essayer d’être dignes de toi. Nous allons mettre des mois de juillet partout, et ta voix, et la musique qui faisait de toi une princesse, et ton rire, et ton ironie, ta douceur, cette façon de ne pas s’en laisser compter par ce qui voudrait nous grignoter et nous faire peur, nous tenterons d’en remplir nos jours. Voilà, ce matin, parce que ta voix résonne en nous, mais que tu n’es plus tout à fait là, parce que tu avais vingt-cinq ans, parce que tu aurais tenu salon et enchanté les tiens longtemps sans un matin de janvier, nous nous moquerons des matins qui ne reviennent pas. Nous allons vivre pour l’éternité du soleil, pour une jeune femme qui croise les jambes sur une bergère au milieu des gravats, qui hausse à ses lèvres une tasse de thé en souriant, qui est la vie. Ta vie trop courte, belle Arthénice, nous allons essayer de la rendre longue, très longue.

Message de Laurence, lu aux funérailles de Mathilde

Dominique A: Les treize titres de "Vers les lueurs" (album 2012)



Voix haut perché, mode sombre et tendu, exigence littéraire dans le droit fil de Manset, Murat : le Dominique A de 2012 est un bon cru - un quintette à vents ajoutant une tonalité boisée et baroque aux sons électriques. Le chanteur commente ses nouvelles chansons, titre par titre.
1 : Contre un arbre. « Oublie la ville : Une vraie déclaration d’intention en début d’album. Guitares électriques, hautbois et basson sont associés comme dans tout le disque, enregistré en son « direct ». Dans la vie, le Nantais Dominique A n’oublie pas sa ville : « je ne me réinstalle pas à Nantes, mais j’ai envie d’être là. Je me sens apaisé et serein, ici. » Avec vue sur la Loire.
2 : Rendez-nous la lumière. « Une chanson lyrique, voire pompière, pour dire les regrets de l’homme d’avoir saccagé son univers. » Le premier single du 9e album.
3 : Ostinato. « Des bruits de verre, un enfant qu’on entend pleurer dans une maison. Un titre marqué par mon obsession de la fuite. »
4 : Parce que tu étais là. « Une mélodie d’amour boisée, inspirée d’un roman où j’ai trouvé cette idée : Au-delà de tout romantisme, le fond de l’affaire tient à ce constat objectif : je suis venu vers toi parce que tu étais là. »
5 : Parfois j’entends des cris. « J’ai pensé au travail jazzy de Comme à la radio, de Brigitte Fontaine. C’est le morceau de bravoure scénique du disque. »
6 : Close West. « Cette chanson évoque mon ouest proche, celui de Beslé-sur-Vilaine, près de Massérac et Guipry. J’y ai toujours une maison de famille. C’est un lieu d’enfance lointain et proche, à cheval entre les deux départements. Quand je passe en train, si j’oublie de regarder la Vilaine, j’ai l’impression d’avoir raté mon voyage. »
7 : Loin du soleil. « C’est mon Enfant du Pirée [la chanson de Dalida] à moi ! J’ai voulu une chanson chaloupée et suave. Elle raconte un désir de douceur. J’aime les deux, le côté à vif du rock et la nonchalance jazzy, avec (comme tout l’album) un son live, travaillé en résidence à Fouesnant. »
8 : Quelques lumières. « Parmi la vingtaine de chansons de départ, cette chanson pop a d’abord été écartée. On me disait qu’elle méritait d’être sur le disque : il y avait quelque chose à faire. Ce n’est pas toujours le cas. J’ai voulu faire une reprise de Ma jeunesse enfuie, d’Yves Simon. David Euverte (arrangeur) m’a dit : je ne peux rien faire pour celle-là. »
9 : Vers le bleu. « Une histoire de mauvais garçon. Elle ne parle pas de mon frère, je suis fils unique. Je ne sais pas d’où ça vient. D’un roman de Dominique Fabre. Cette chanson est une petite nouvelle. En répétitions, elle est partie vers un son très « Motown ». J’aime bien ce côté sucré-salé de la pop, une histoire sombre sur une musique gaie. Ce n’est pas ma préférée… Pourtant, elle sera sans doute un single ! »
10 : La Possession. « C’est le nom d’une localité de la Réunion. Cette chanson assemble des images éparses sur une pulsation afrobeat, avec les arrangements à la Ravel de David Euverte. »
11 : Ce geste absent. « Un slow classique à la Christophe. »
12 : Le Convoi. « Quatre accords en boucle, des images de jungle birmane, une envolée d’instruments. »
13 : Par les lueurs. « Les trois dernières chansons du disque, comme celle-ci, sont des boucles de quatre accords non-évolutives. Celle-ci collecte une série de flashs sur l’envie d’être traversé par des euphories, des bonheurs impalpables. »
Daniel Morvan
Vers les lueurs, sortie le 26 mars 2012. Dominique A en concert au Lieu Unique (Nantes), jeudi 12 avril à 20 h 30 (18 €/25 €). Avec en première partie, « La Fossette » (premier album du chanteur) en live. Réservation : tél. 02 40 12 14 34.

dimanche 27 février 2011

C’est un pays de montagne tout à fait banal


« C’est un pays de montagne tout à fait banal par rapport au Buckinghamshire. »
Cette phrase, je n’y avais d’abord pas fait attention. Ça s’installe sans bruit. Comme un chat près de vous. Vous vous apercevez de sa présence, il est là depuis de longues minutes.
Je ne me souviens jamais des phrases. Je suis incapable de citer les auteurs que je préfère. Aussi l’installation en moi de « C’est un pays de montagne tout à fait banal par rapport au Buckinghamshire » constitue un mystère. Elle s’est signalée à mon attention lors d’un séjour à la montagne. C’était l’été sur le plateau du Vercors, lorsque cette réflexion me vint : « C’est un pays de montagne tout à fait banal par rapport au Buckinghamshire. »
D’où vient cette phrase ? Pensais-je réellement que le Vercors est moins beau que le Buckinghamshire, et pourquoi ?
Incapable d’expliquer cette citation, qui avait fusé impulsivement, comme ces paroles que certains malades ne peuvent réprimer, je tentai de me souvenir de son origine. Je tentai de reconstituer mon parcours, afin de remonter à l’ouvrage qui contenait la phrase.
Je ne l’ai jamais trouvé.
Mais, devant tout paysage remarquable, je continue à dire : C’est un pays de montagne tout à fait banal par rapport au Buckinghamshire.

vendredi 25 février 2011

Corinne Bayle : Du Paradis, journal de Poméranie

Corinne Bayle, qui enseigne à Brest, propose une relecture rêvée des romantiques allemands. Goethe, Hölderlin, Kleist sont les modèles de ce journal de jeunesse d’une contemporaine de Werther, qui invente la peinture de paysage. « Ce que nous appelons nature est un poème enfermé dans une merveilleuse chiffrée ». La fleur est aussi l’autre nom de la beauté disparue, celle de la toute jeune Sophie, « la rose de Grüningen », qui laisse un amoureux inconsolable. Il y a du Julien Gracq dans cette capacité à faire ressentir l’exaltation des premiers romantiques, en quête d’une « forme poétique du monde ».
Daniel Morvan.
Corinne Bayle : Du Paradis, journal de Poméranie (1792-1804). Aden, 160 p., 17 €.

mardi 22 février 2011

Le théâtre Graslin

Jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, Nantes s'est parfaitement passé de salle de spectacle. Cette idée apparaît avec la montée de la bourgeoisie, qui préparait la Révolution dans les têtes en mettant le culte de l'art au centre d'un quartier : ainsi naquit le théâtre Graslin, qui retrouve sa place après une importante rénovation. Dans un ouvrage publié par Joca Seria, l'historien Alain Delaval écrit le roman vrai de cette irruption de la modernité dans une ville encore médiévale. Alain Delaval souligne combien, à sa construction, le théâtre de Nantes trancha par sa modernité. Alors que nous serions tentés de n'y voir qu'un théâtre à l'italienne comme un autre. C'est l'économiste britannique Arthur Young qui, lors d'un voyage en France, constata le contraste entre l'archaïsme de la Bretagne agraire et ce qu'il découvre sur la place du théâtre à Nantes, comparant la capitale économique de la Bretagne à Londres. Le théâtre Graslin est le reflet d'un goût nouveau pour les loisirs. Jusqu'alors, le théâtre était représenté dans des lieux de fortune, comme les salles du jeu de paume. Le siècle des Lumières est une époque qui veut harmoniser le quotidien et la beauté, la musique, les sens : ce sont les idées des hommes éclairés comme Graslin, le financier qui donne son nom au théâtre. « Le coup de génie de l'architecte Mathurin Crucy (prix de Rome 1774), c'est d'avoir conçu un vestibule ouvert sur la place, conçu comme un lieu de transition entre le temple des plaisirs et la vie urbaine. À la différence des édifices antérieurs d'inspiration italienne, les théâtres de Versailles, Bordeaux, Besançon, souvent fermés sur eux-mêmes. Et, dès l'origine, il prévoit en face du théâtre une promenade, qui sera le cours Cambronne. J'ai trouvé une lettre révélatrice de Crucy, à propos de la place des Lices à Rennes, mais qui s'applique aussi à la place Graslin. Il dit : « Les hommes veulent des femmes et les femmes veulent des jeunes gens, ce n'est pas dans un grand parc qu'elles les trouveront mais dans une promenade. »
Daniel Morvan
Alain Delaval : Le Théâtre Graslin à Nantes. Éditions Joca Seria, 180 pages, 30 €.

Marcel Schwob, l'homme des Vies imaginaires

Marcel Schwob
C’était l’un des esprits les plus originaux de son temps, auteur d’une Croisade des enfants admirée de R. M. Rilke, de Vies imaginaires qui sont l’une des sources d’un autre chef d’œuvre, les Vies minuscules de Pierre Michon, ainsi que des Fictions de J. L. Borgès. Il influença aussi l’œuvre de sa célèbre nièce, la photographe surréaliste Claude Cahun, qui se fit, à son instar, « biographe de sa propre vie imaginaire ». On peut encore comparer Schwob à un autre Breton, Max Jacob, par son action de déconstructeur radical, d’homme qui fit droit aux formes et aux énergies nouvelles.
A l’occasion d’une grande exposition de la médiathèque de Nantes, les éditions Gallimard ont publié en 2005 un catalogue qui remet Schwob à sa place de fondateur admiré dans le monde entier. «L’art, disait-il, est à l’opposé des idées générales, ne décrit que l’individuel, que l’unique» : parti pris qui s’opposait au naturalisme littéraire, pour prôner l'indépendance de la littérature, qui se doit d'interroger l’énigme des existences. « L’art consiste à donner au particulier l’illusion du général », écrit-il aussi. S’il est dandy comme les auteurs fin de siècle, tel Huysmans, il n’enferme pas son écriture dans la cage dorée du délire et du fantasme.
D’ailleurs, comment le pourrait-il, ce fils de journaliste ? Marcel est le fils de Georges Schwob, directeur d’un des plus grands périodiques régionaux français, Le phare de la Loire, qu’il acheta en 1876. Georges Schwob, qui fut condisciple de Flaubert et ami de Nerval, Baudelaire, Théophile Gautier, s’était installé à Nantes, dans un appartement du cours Cambronne, en 1876. 
C’était un grand lettré et Le Phare (journal républicain et anticlérical) fut pour son fils (qui y collabore dès l’âge de onze ans, avec un compte-rendu d’Un Capitaine de quinze ans) «l’instrument privilégié qui lui permet d’assouvir un désir d’écriture reconnu et encouragé très tôt par la famille», indique Patrice Allain dans l’ouvrage. La presse fonde alors son essor sur la solidarité avec les hommes de lettres, pourtant socialement éloignés du milieu journalistique.
Marcel Schwob est un enfant surdoué, qui connaît l’allemand et l’anglais à dix ans. Il s’installe à Paris en 1882, chez son oncle Léon Cahun. Il étudie la philologie, se passionne pour Villon, et suit les cours du lycée Louis Le Grand. Après son échec à Normale, il intègre les lettres parisiennes en 1890. 
Politiquement, il se situe dans un « anarchisme littéraire ». Bien que dreyfusard, ne signera pas l’appel à défendre Zola après son J’accuse. A Nantes, les Schwob durent subir des attaques antisémites, et la nièce de Marcel, Lucy Schwob (alias Claude Cahun) se souvenait avoir été «lapidée» avec du gravier dans la cour de son école, après la parution d’une brochure sur les Juifs de Nantes.
De la capitale, Schwob continuera à donner des billets au « Phare ». Mais surtout, dans ce parcours classique du Breton (d’adoption) monté à Paris, il devient la coqueluche du tout Paris, sans céder sur son exigence littéraire. Il est ami de Willy et Colette, de Claudel, de Gide, d’Oscar Wilde… « Il a la curiosité des coins d’humanité excentriques, mystérieux, criminels », lit-on dans le Journal des Goncourt. « Je ne crois qu’aux monstres que j’ai fabriqués moi-même », dira, de même, sa nièce et réelle héritière spirituelle. Le Livre de Monelle, qui paraît en 1891, est inspiré par une prostituée dont Schwob tomba amoureux. 
C’est un portrait de femme entièrement tendue dans l’attente, salué par Maeterlinck (Monelle est sœur de cette Mélisande que magnifiera Debussy dans son opéra) et André Breton. Il publiera ensuite La Croisade des enfants et Vies imaginaires. L’œuvre de fiction de Schwob s’achève là : il continue de traduire, mais le mal inconnu qui le ronge le pousse à partir sur les traces de Stevenson, en Polynésie, et en Arabie, se dégoûte au spectacle du colonialisme français et meurt à trente-sept ans. 
Cette disparition prématurée contribuera à la relative éclipse d’une œuvre jugée décadente. En réalité, Marcel Schwob a posé les questions dont vit aujourd’hui la littérature et son œuvre n’a cessé d’influencer son siècle.

Daniel Morvan

Marcel Schwob, l’homme au masque d’or. Ouvrage collectif. Editions Le Promeneur (Gallimard)/Ville de Nantes). 206 pages, 110 illustrations, 39 euros. Lire aussi Vies imaginaires, édition de poche en Garnier Flammarion (2005), avec dossier.

lundi 3 janvier 2011

50e anniversaire de "Lola": Charlotte célèbre l'événement


21 novembre 2010 à La Cigale de Nantes.
50e anniversaire de la sortie du film "Lola" (1961), tourné en ces lieux par Jacques Demy, qui aurait eu 80 ans en 2011. Charlotte célèbre l'événement en toute simplicité. En croquant un macaron.

vendredi 19 novembre 2010

Une nouvelle plume pour Benoît Gautier

Le chanteur et guitariste est au TNT avec douze nouvelles chansons écrites par Daniel Morvan.
Mo’song est l’hommage d’un père à sa fille. Une ballade belle et sombre écrite par Daniel Morvan en mémoire de Mathilde en juillet, chanteuse disparue en janvier dernier. Mo’song est aussi la première chanson de l’écrivain nantais, journaliste à Ouest-France, écrite pour Benoît Gautier.
Chanteur et guitariste, ce dernier a réalisé en 2009 l’album de Mathilde, Break a leg. Mo’song a ouvert une brèche, un nouveau chapitre de l’histoire d’amitié qui lie les deux hommes. « J’étais un peu paumé, tout s’écroulait. Je n’avais jamais bossé avec un auteur et j’avais besoin de me mettre en danger. Je lui ai demandé un premier texte. J’avais aimé sa plume sur les chansons de Mathilde. »
Le premier texte fait mouche. Une dizaine suivra. La plupart en français, quelques touches d’anglais « à la Melody Nelson ». Sur les mots, Benoît Gautier compose un paysage très rock. « J’avais envie d’un trio guitare, basse, batterie. D’un rock à consonance seventies, des références à Neil Young, Lou Reed, le Velvet. Daniel m’a permis d’intégrer ces références anglo-saxonnes dans ma musique. D’emblée, il a puisé sans le savoir dans tout ce que j’aimais. »
Edie, l’autre titre que l’on peut écouter sur myspace, évoque une actrice américaine, égérie d’Andy Warhol. Et Manhattan. « J’ai de la famille à New York. Cet espace américain a de l’écho chez moi. »Cette formule plus rock que les projets précédents de Benoît Gautier (musicien de Momo) a scellé une sorte de pacte avec Daniel Morvan. « Il ne s’agissait pas de prolonger une histoire commencée avec Mathilde. Mais de mettre en pratique cette leçon de vie qu’elle nous a laissée. Cette idée de savoir prendre des risques. »
Les douze titres formeront bientôt un album, à paraître durant le premier semestre 2011. Cette semaine, ils vivent déjà sur scène avec François Saumonneau à la basse et Lionel Arthur à la batterie.
Isabelle LABARRE.
Article paru dans Ouest-France à l'occasion des trois premiers concerts de Benoit Gautier, les 18, 19 et 20 novembre 2010 au TNT (Nantes). Photo: Fabrice Denis.

lundi 25 octobre 2010

Hélène Demy, soeur de Jacques


Parmi les invités du cinquantième anniversaire du tournage de « Lola » à Nantes, Hélène Demy, la sœur du cinéaste. Professeure d’anglais à Courbevoie, elle est née 21 ans après Jacques Demy. L’enfance de Jacques Demy est racontée en détail dans Jacquot de Nantes, le film d’Agnès Varda. Hélène Demy est, pour sa part, toujours restée en retrait.
 « Nous étions extrêmement proches. Pendant le tournage de Lola, j’étais petite. Je me souviens surtout de Frankie, le marin américain qui  emporte la jeune fille dans la fête foraine: je m’identifiais à la petite Cécile. Jacques me voulait pour le rôle de Suzanne, la copine de classe de Cécile, mais j’ai refusé par timidité. Je me souviens de tous ses tournages, puisqu’il tournait pendant l’été, quand j’étais en vacances.
Hélène Demy a été scripte sur Peau d'âne

J’ai été scripte sur Peau d’âne, à Chambord. J’ai obtenu ma carte professionnelle de scripte, mais j’ai vu quel métier compliqué est le cinéma. Il fallait sans cesse prendre son téléphone pour trouver du travail, et quelles difficultés pour trouver des financements…
Je suis devenue professeur d’anglais à Courbevoie. Nous nous retrouvions aux vacances à Noirmoutier, au moulin, où Jacques écrivait tous ses films. Mon préféré, c’est « Une chambre en ville », qu’il a écrit très jeune. Il  s’est inspiré de son père, qui, en arrivant à Nantes, a loué une chambre en ville, chez une colonelle. Ce film est comme un opéra, avec du tragique, du comique, du lyrique, une très belle musique…
Qui était Jacques ? Quelqu’un de très obstiné, qui avait une idée bien précise de ce qu’il voulait faire et ne se compromettait pas. Il allait jusqu’au bout. Il était très gentil et très têtu. « Je ne suis pas breton pour rien », disait-il souvent.
Pendant les vacances, il nous montrait des films en 16 mm. Nous regardions les films d’Hitchcok, « Le Plaisir » de Max Ophüls, les Renoir. Il adorait jouer au projectionniste, distribuait des glaces à l’entracte. Ça l’amusait beaucoup, moi aussi. »

Daniel Morvan

vendredi 3 septembre 2010

Mathilde en Juillet: "un disque pour l'éternité"


Disparue, Mathilde laisse "un disque pour l'éternité"



Mathilde en Juillet, la chanteuse antaise, ici sur scène, lançait son album en décembre 2009. Le 26 janvier 2010, le cancer l'a emportée.
DR





Ce soir du 14 décembre 2009, sur la scène du Pannonica, à Nantes, Mathilde en Juillet étrenne sa nouvelle robe.
Rayonnante et facétieuse, la Nantaise présente son premier disque, le très abouti Break a Leg.

Depuis des mois, elle lui consacre toute son énergie. Malgré le cancer. Mais, le 26 janvier, il a été le plus fort et a emporté Mathilde à 25 ans. Elle laisse ses refrains folk et pop, douze pépites amusantes et mélancoliques, fruit d'une aventure artistique lancée au hasard d'une chute de vélo, à l'été 2006.
Cheville en vrac. Finie la saison sur l'île de Ré. Retour à Nantes sous le toit parental. Plâtrée, Mathilde Morvan installe au salon son petit monde, des piles de bouquins, de CD. Lit, écoute, gratte sa guitare. Mathilde chante en juillet. Et ça lui plaît. Elle trouve sa voix, douce et légère, son nom de scène, monte un spectacle au TNT, salle culturelle nantaise.
C'est l'automne, Mathilde éclôt.
Pendant trois ans, dans ce lieu chaleureux, Mathilde a joué, murmuré ses textes, ne cessant d'avancer avec force vers cette envie de construire. « Mathilde était au coeur des choses et de ses projets. C'était une artiste très exigeante avec elle-même. Pleine de doutes, qui la rendaient fragile, et de certitudes qui lui permettaient de surmonter cette fragilité », confie Philippe Guihéneuf, directeur du TNT. « Mathilde passait souvent nous voir pendant qu'elle était hospitalisée tout à côté. Elle faisait le mur et venait respirer ce qui la menait : l'air de la création. »

Jacques Demy et les langoustines



Avec détermination, entre ses séances de chimiothérapie, elle cisèle ses petites histoires, parfaitement arrangées par son complice Benoît Gautier, chez qui l'album a été en partie conçu. « J'ai tout suivi à la maison, c'était émouvant... Mathilde, je l'ai tout de suite adorée. Sa personnalité me marquera à tout jamais. Elle ne se plaignait jamais de sa maladie. Elle laisse tellement de joie », lâche Ingrid Liman, compagne du musicien, qui fonde l'association La belle Arthénice, en hommage. « Pendant les sessions d'enregistrement, elle était en état de grâce, un pur bonheur pour l'ingénieur du son, qui aimait son côté bête de studio », raconte Daniel, son père.
Pour réaliser Break a Leg, Mathilde a été encouragée par Trempolino, structure nantaise qui accompagne les artistes. « En ayant très peu joué sur scène, elle avait une aisance incroyable. J'ai été très touchée par ses chansons tellement bien pensées, belles et sincères, qu'on avait l'impression de les connaître », confie Benjamin Reverdy.
Unanimes, ceux qui l'ont croisée évoquent son humour et son incroyable insouciance. Elle aimait le cinéaste Jacques Demy, les langoustines, la folkeuse Alela Diane, le rosé, et rire avec son amie Léa. «On rigole tellement... Je comprends pas pourquoi on n'a pas plus d'abdos !», disait-elle.
Son disque reste le témoin vivant de son combat contre la maladie. Dans une émission de radio, Mathilde confiait récemment : « J'espère que je ferai d'autres choses, plus tard, peut-être même pas de la musique, peut-être je vais me mettre à la peinture ou j'en sais rien, mais au moins j'aurais fait ça. Ces morceaux, ils sont là pour l'éternité... »


Break a Leg est distribué par Coop Breizh. Sites : www.myspace.com/mathildeenjuillet