10e fête des langues à Nantes: avec les Araméens de Nantes
Des îles dans l'île
20 familles à Nantes
2014, Nantes: Un parcours poétique grec avec Michel Volkovitch
Michel Volkovitch, quel est pour vous, fin angliciste tombé amoureux de la Grèce, le sens d'un parcours poétique évoquant l'exil grec, l'amour hellène ?
Par-delà les poésies de tel ou tel pays, il y a la poésie universelle. Les traductions sont là pour enrichir cette poésie en faisant circuler les poèmes par-delà les frontières. Tout le monde y gagne : le pays de départ qui donne à ses poètes une plus large audience, et le pays d'arrivée qui découvre des voix et des beautés nouvelles. S'agissant de la Grèce et de la France, nous avons un pays, le nôtre, où la poésie occupe actuellement une place plutôt marginale, et un autre où elle est plus aimée, plus pratiquée. Elle est la langue maternelle des Grecs. La Grèce d'aujourd'hui possède un trésor au moins : sa poésie, l'une des plus riches du monde selon certains. Nous avons donc tout intérêt à écouter ce qui s'écrit là-bas... En consultant par exemple l'Anthologie de la poésie grecque contemporaine 1945-2000 (Poésie/Gallimard), et en suivant le parcours poétique dans les rues de Nantes le 16 mai !
Quels poèmes doivent-ils y figurer selon vous ?
La poésie grecque étant d'une extrême abondance et d'une extrême variété, on ne peut tout faire entendre d'un seul coup. Ce que je souhaite, c'est qu'on ne se limite pas toujours aux mêmes noms. Rìtsos, par exemple, est un grand poète, mais il n'y a pas que lui ! J'ai traduit jusqu'à présent, quant à moi, plus de 150 poètes grecs, dont une grande partie mérite, je crois, d'être connue à l'étranger.
Ce parcours ne se limite pas à des lectures, il est ponctué de musiques. On rendra hommage au « rebetiko », avec un moment « cabaret » dans un bar nantais, le Chavalais. Qu'est-ce donc que cette musique ? Une forme grecque du fado ?
C'est une certaine forme de chanson, apparue vers 1920 dans les ports grecs, composée à l'origine par les mauvais garçons. Les chansons rebètika ont pour thème la misère, la drogue, la prison, la mort, et l'amour bien sûr, malheureux de préférence. Longtemps méprisées, voire interdites, ces chansons sont devenues à la mode après la guerre au point d'être aujourd'hui connues et aimées de tous. Alors même qu'on n'en compose plus de nouvelles depuis 1960. Je viens de publier aux éditions Le miel des anges, sous le titre La Grèce de l'ombre, 130 de ces chansons en version française.
Que pensez-vous de cet élan d'amour pour la Grèce, parti de Nantes avec le mouvement Je suis grec ?
Je me suis joint au mouvement dès le début avec enthousiasme. Il faudrait des dizaines, des centaines d'initiatives comme celle-là pour secouer l'apathie de ce pays fatigué. Et pas seulement en ce qui concerne la Grèce.
Quelle est votre Grèce intime, la plus chère à votre coeur ?
Ma Grèce est moins celle du soleil, des îles et des antiquités que celle qu'on connaît moins, la Grèce des villes, Athènes, Thessalonique, Patras, Yànnena, où les Grecs d'aujourd'hui vivent, travaillent, aiment et souffrent. Et maintenant qu'ils souffrent plus que jamais, il est urgent de les aider en combattant la mauvaise image qu'ils ont parfois à l'étranger. Ma façon à moi de me battre pour eux, c'est de traduire et faire connaître ce qu'ils créent de beau et de fort en poésie, en prose, au théâtre. De les montrer tels qu'ils sont vraiment à travers ce qu'ils écrivent sur eux-mêmes, avec leurs défauts mais aussi leurs grandes qualités.
Daniel MORVAN.