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vendredi 12 octobre 2018

Jean-Louis Murat en 1999: Alexandrie si possible #murat



Archive 1999. - Plusieurs jours à jouer sur les machines, travailler des samples d'Olivier Messiaen ou Iggy Pop, soigner un piano-voix, tester ses nerfs et ceux des autres, parce qu'il faut prévoir le pire, on n'est jamais déçu. 'Murat travaille sa tournée à venir avec ses musiciens, sur le plateau de la salle Paul-Fort. ' Il faut oublier l'album et repartir à zéro. Et surtout, on est là pour s'amuser. ' Murat a encore dans les yeux l'émail bleu du ciel d'Egypte, dont il revient. Où il aimerait vivre. Retour amont vers les crêtes enténébrées de ' Mustango ', dernier album fabriqué à New York et Tucson, dédié au Mustang, le royaume le plus élevé du monde, enclave tibétaine au nord du Népal, à 8167 m d'altitude. Beaucoup plus haut que la Dent de la Rancune, ce sommet auvergnat qui apparaît dans une de ses chansons, à la cote 1493 (Christophe Colomb + 1, s'amuse-t-il). 

Le poncif le plus courant, au sujet de Murat, c'est la chrysalide cyclothymique, l'Auvergnat ombrageux, le beau ténébreux ou même, s'amuse-t-il, le bellâtre de province. "Question de caractère, moi je peux changer d'humeur au cours d'un concert, et dans une même chanson. Comme je contrôle toutes les rythmiques aux pédales, je peux tout bloquer, et j'envoie un maximum de samples. 

Et quand on sait que la version initiale de Nu dans la crevasse (apex de l'album, une mélopée quaternaire à la Neil Young) s'étendait sur 17 minutes, on peut s'attendre à des concerts très différents d'une ville à l'autre, selon le feeling. "Nous allons travailler dans un esprit d'improvisation, comme en jazz. Nous ferons joujou tous les soirs. Il y a trop de concerts où tout le monde s'ennuie, les musiciens font une dépression au bout de 50 concerts. Nous, ça va être une grosse claque. J'espère bien qu'on va leur mettre une baffe! J'ai tellement une image stéréotypée de chanteur..."
De chanteur quoi? 
Il ne finit pas sa phrase. Le sensible se rétracte à la seule vue d'un appareil photo, le poète si loin des clichés: ' Est-ce ainsi d'écorce fille/ Que l'on va de ci de là au monde épais/ En quelques battements de cils/ Que la pluie de ci de là/ Inonde. '
 Les mots de Murat ont des éclats de gemmes à porter dans le noir. Jean-Louis Murat, homme d'image? Il existe un film réalisé par Pascale Bailly, ' Mademoiselle Personne ', improvisé sur une tournée, en compagnie d'Elodie Bouchez. 
Un autre film de Claire Denis, avec Jean-Louis Murat, tourné en Egypte, est resté bloqué au montage. 
Et le chanteur a le désir de tourner quelque chose en vidéo numérique, dont le sujet serait, au hasard, Jean-Louis Murat. "Moi par moi." 

Retour d’Égypte


Moi, c'est qui? "J'étais du douzième siècle, puis une fourmi, et enfin dans le grand espace, je me retrouvais dans la nébuleuse du Chien avec un nom pour spécialiste. ' Extrait d'un feuilleton de Jean-Louis Murat sur le site web du chanteur. 
Identité problématique qui peut le conduire à tomber amoureux d'un pays, laisser derrière lui son manteau de pluie, parier sur la vraie vie. "De retour d'Egypte, je voulais acheter une maison à Assouan, c'est le paradis sur terre, là-bas. N'importe quel jeune qui joue et chante 20 secondes, c'est plus riche que 20 meilleurs albums de l'année en France. Ils nous le disent: quand on entend votre musique, on voit l'état lamentable dans lequel vous êtes. Quand je vais en Égypte, je ne dis pas que je suis musicien. J'ai embarqué, grâce à Youssef Chahine, sur un de ces bateaux qui emportent les jeunes sur le Nil, le seul endroit où ils font la java. Tous jouaient, chantaient, dansaient. Et en Égypte, tu sauterais sur toutes les filles et tous les garçons qui passent tellement ils sont beaux. Les femmes en passant te regardent dix centimètres au-dessus de la tête, en faisant cliqueter leurs bracelets, elles ont la beauté de Nerfertari!"
C'est à cause de cette beauté nubienne que Murat, après une tournée de 100 concerts (' si on ne s'ennuie pas '), un album live dans une ville dont le nom sonne bien (Rostock, Alger, Prague, Trémel, Plouegat-Guérand ou Saint-Petersbourg), voudrait enregistrer son prochain disque du côté d'Alexandrie. Si possible.

Daniel MORVAN


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866 mots

mardi 17 mars 2015

Véronique, comment crois-tu que la musique vienne


Entretien


Pas vraiment un secret : la tournée « américaine » de Véronique Sanson en France casse la baraque.
Au programme, des chansons tirées des trois albums Le maudit (1974), Vancouver (1976) et Hollywood (1977). Composées alors que Véronique Sanson vivait aux États-Unis avec son mari, Stephen Stills. « Le plus réussi, le plus abouti des trois est Hollywood ; je crois avoir capté toute la magie de la musique américaine avec ces arrangements de cuivres, ciselés par le trompettiste Steve Madaio. »

Ces chansons sont aussi l’autoportrait d’une femme qui appliqua la maxime de Blaise Cendrars : « quand tu aimes il faut partir ».
Le public avait-il écouté la pianiste entre ses lignes ? La chanteuse n’entend pas réveiller les vieilles blessures. À 65 ans, elle chante ses tubes sans nostalgie, « comme si je me replongeais dans un roman passionnant, au détail près que j’en suis l’héroïne, et que mes chansons, je les vis sur scène. Le Maudit (qui est une sorte d’autoportrait) continue de m’émouvoir. »
Les succès de cette décennie bénie ? Une avalanche de compositions parfaites, qui parlent de fugue, de solitude, de trahison : Aucune n’a pris une ride, ni Bernard’s song, ni Je suis la seule, ni l’imparable Vancouver, qui dit le meilleur de cette dérive folle et féconde, où VS réinventait la chanson aux meilleures sources.
Et comment crois-tu, Véronique, que la musique vienne ? Ça la fait rire, qu’on lui retourne en question un titre de chanson : « Comment ? Mais en l’aimant, en croyant en elle, en la malmenant. J’en aurai entassé, des idées de chansons. Sur des paperolles, des tickets, des boîtes d’allumettes, sur ma main. Toutes mes chansons sont nées comme ça, attrapées avant qu’elles ne s’en aillent, sur des petits papiers. » 

C’est comme ça que s’est écrite Ma Révérence, la plus belle de toute. Véronique la chante mais ne tire aucune révérence : un nouvel album est confirmé pour bientôt, et une autre tournée… « Aller de ville en ville, ça je l’ai bien connu… »


Daniel Morvan


Jeudi 26 mars : Zénith de Caen. Vendredi 27 mars : Zénith de Nantes.

Photo: DR