Un lieu d'arts va voir le jour dans un ancien commerce du quartier Chantenay. Une manière de faire du neuf avec du vieux, pour le bonheur de ce quartier nantais bien à l'ouest.
Le projet
Chalut les artistes, Neptune rouvre la boutique ! Au-dessus de la vitrine aveugle, un poisson en tôle rouillée. Emblème peu riant d'un commerce fermé depuis des poissons-lunes. Enseigne devant laquelle tout Chantenay est passé : qui pour prendre son C1 ou n°10 (place Macé), qui pour écouter Dominique A période « La Fossette » à l'Olympic. Autant dire que cette Chantenay la rouge où tout ferme attend un peu de rose dans sa vie. Un peintre poète à la Jacques Demy pour rêver un peu.
La poissonnerie ne rit plus depuis 1972. Date avancée par René, mémoire de Chantenay la rouge. Depuis, silence d'aquarium pour poissons solubles et aloses dépressives. Cherchant un atelier, quelques Picassos de Chantenay ont eu la curiosité de pousser la grille. Grille murée, lieu clos. Mais un lieu, c'est fait pour nager, non ?
Un étal de faïence
C'est l'un de ces petits commerces d'autrefois que l'on visite avec au coeur un effroi abyssal. Une fois le seuil franchi, miracle : un étal orné de poissons et crustacés de faïence, comme la friture d'or des rois d'Égypte dans la crypte de Ramsès. La déesse des sardines avait, en secret, décoré la boutique. Un korrigan des landes, dit-on, a coulé une chape de béton dans la nuit.
Tout le monde s'y est mis, pioche à l'épaule et crayon à l'oreille, pour donner un coup de neuf. Pinceau d'une main, truelle dans l'autre. Les dieux de la métamorphose ont pour nom Kat et Louise, Gladys et Pascal, Erwan, Claire, Bruno. Six artistes et un lutin bricoleur réinvestissent le 24, boulevard de la Liberté pour en faire un atelier tous âges.
On ne ramène rien à la maison !
Ici, autour de l'ancien étal, l'atelier des peintres. Gladys pourra y peindre, Pascal et Bruno se feront des toiles. En bas, un grand espace pour les enfants du quartier. « Les enfants et tout le monde, assure Kat, l'animatrice à bretelles, aux yeux plissés qui rient du désir de créer et de partager. Le seul principe, c'est que les enfants ne ramènent pas les dessins aux parents, pour être complètement libres de s'exprimer. » Et, présume-t-on, même principe pour les adultes : on ne montrera rien à personne, sauf consentement des enfants.
Ils présentaient ce nouveau lieu un certain vendredi de grand vent. Il y avait de la résurrection dans la blouse rouge à pois de Gladys, qui filait un coup de fil à avril. Roger Dimanche, peintre à fresque du bas Chantenay, allait peindre des murènes sur cette vitrine murée.
Pour l'instant, on cause plaque de plâtre, on espère une vitrine. L'atelier devrait ouvrir ses portes en se greffant à une fête de rue voisine, celle de la Tannerie, le 10 juin prochain. « Cette poissonnerie, elle veut dire quelque chose, ça parle aux gens du quartier, s'anime Bruno, le peintre guévariste de la rue Garibaldi. Lui redonner une vitrine et revoir les étals en faïence, ça va être magique. Remonte tes bretelles, on va se marrer à la Poisonnerie ! »
Samedi 10 juin, ouverture de La poissonne rit, atelier d'arts, 24, boulevard de la Liberté, à Nantes. Contact : kat.lecointe@laposte.net
Daniel MORVAN.
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